L’Europe en famille
La noblesse terrienne polonaise au vingtième siècle

Sur l’exposition

L’exposition « L’Europe en famille. La noblesse terrienne polonaise au vingtième siècle », réalisée par l’Institut de la mémoire nationale (IPN) en collaboration avec l’Association polonaise de la noblesse terrienne (PTZ) relate l’histoire des propriétaires terriens et de leur sort au XXe s.

« L’Europe en famille » ne traite pas seulement des relations de l’aristocratie polonaise avec les familles européennes. Les familles issues de la noblesse et leur propriétés étaient souvent le lieu où l’on importait de nouvelles résolutions sociales ainsi que des innovations techniques provenant des pays capitalistes de l’Ouest comme la culture et l’élevage spécialisés. Cela s’effectuait habituellement grâce à l’éducation et l’apprentissage des jeunes nobles dans les universités et les propriétés occidentales, les liens commerciaux, les voyages à l’étranger. Wincenty Lutosławski, déclare en 1939 qu’« une naissance élevée exige plus de responsabilités que de privilèges ». Les nobles remplissaient habituellement le rôle de leader sociaux locaux, contribuant au développement économique et culturel de leurs régions.

« L’Europe en famille » est également une métaphore des destinées de nombreux nobles après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale en 1939. À son issue, les familles de la noblesse terrienne furent dispersées dans le monde entier — nombre d’entre elles vit encore en émigration jusqu’à ce jour, mais c’est justement grâce aux liens familiaux soudés qu’elles entretiennent sans répits un contact avec leur pays et travaillent à sa cause.

L’exposition traite de la noblesse terrienne polonaise à travers l’histoire d’une douzaine de familles choisies. Ses auteurs ont en effet considéré que seuls des exemples et des individus concrets donneraient à voir aux visiteurs que c’était un groupe social dont les représentants pouvaient être désignés comme des élites, autrement dit, dans l’acception contemporaine de ce terme — des leaders locaux. Ils étaient actifs dans de nombreux domaines : économique, politique, caritatif et culturel. Presque chaque famille terrienne compte parmi ses ascendants des personnages engagés dans des événements connus des manuels d’histoire, des personnalités qui ont contribué à l’histoire de la Pologne et ont influencé son cours.

Le projet de l’exposition « L’Europe en famille. La noblesse terrienne polonaise au XXe s. » d’IPN et de PTZ  fait aussi le récit de l’anéantissement de ce groupe social dans les années 1939–1945 par les totalitarismes nazi et soviétique, de sa dépossession après l’année 1944 à l’époque de la République populaire de Pologne ainsi que des pertes entraînées par la liquidation de cette couche de la société.

L’exposition a été réalisée en version polonaise, anglaise et française.

De la revue du professeur Andrzej Kwilecki

« L’exposition ”L’Europe en famille. La noblesse terrienne polonaise au XXe siècle” […] constituera immanquablement l’événement culturel de l’année 2015. Je m’attends à un intérêt accru de la part de la communauté. Il faut souligner à cette occasion qu’au siècle passé, en 1929, pour célébrer les 10 ans du recouvrement de l’indépendance de la Pologne, on organisa à Poznań l’Exposition nationale universelle (populairement appelée PeWuKa), avec une exposition séparée consacrée aux propriétaires terriens et à leurs épouses. J’évoque la célèbre PeWuKa, car elle constitua l’événement le plus significatif dans le milieu des propriétaires terriens pour toute la période de la IIe République: elle mit en évidence les mérites de la noblesse dans la préservation de la polonité lors des annexions successives, puis de la renaissance de l’État polonais après la Première Guerre mondiale. Elle parvint à convaincre les autorités nationales de l’importance des grandes propriétés terriennes pour l’économie. Elle prouva que les propriétaires terriens étaient dotés d’un potentiel organisationnel remarquable et que nombre de ses représentants avaient pour ambition d’agir sur le pays et la société. L’exposition universelle constitua une grande rencontre pour les propriétaires fonciers venant de la Pologne entière.

Entre les expositions de 1929 et de 2015, des événements et des changements tragiques se produisirent pour la noblesse terrienne dans notre pays. Des difficultés apparurent tout d’abord suite à la crise économique mondiale des années 1929–1934. Ensuite, pendant la Seconde Guerre mondiale, la noblesse terrienne subit des persécutions et une politique visant son anéantissement de la part des deux envahisseurs. Dans la Pologne populaire d’après guerre, celle-ci fut brutalement expropriée et privée de tous ses biens.

L’exposition ”L’Europe en famille…” raconte les vicissitudes de l’histoire. Les visiteurs seront émus non seulement par le sort tragique des propriétaires terriens, mais aussi par leur résistance devant les difficultés de la vie, leur aptitude d’adaptation, leur efforts pour maintenir les liens de famille pendant leur dispersion.

Ici, s’impose la sentence de Ludwik Gumplowicz, un classique de la sociologie polonaise datant d’il y a plus d’un siècle affirmant que l’adaptation est le processus social embrassant les groupes et les individus le plus important.  

On peut aujourd’hui estimer que ce pouvoir d’adaptation de la noblesse du XXe siècle est le résultat de l’éducation reçue dans les manoirs et les palais, basée sur un rythme de vie régulier, la discipline, la culture des traditions, le respect pour la connaissance et la réalisation systématique des devoirs et obligations. Je pense que les documents rassemblés dans l’exposition donneront à plus de l’un de nos visiteurs l’occasion d’aiguiser leurs propres réflexions et de prendre part aux discussions sur les traits caractéristiques de la noblesse terrienne polonaise.

Pour terminer, je mentionnerai encore une fonction sociale importante de l’exposition ”L’Europe en famille” : en présentant de nouveaux faits concernant la vie de la noblesse terrienne, cette exposition élargit nos connaissances. Par ailleurs,  la richesse et la variété de ces faits éveille notre imagination et nous incite à formuler de nouvelles questions et à relever de nouveaux défis. »